Les employeurs de l’économie sociale et solidaire dans le monde du travail et des métiers, ou dans celui du Medef ?

En se comportant comme une petite clientèle patronale et corporatiste face au Premier Ministre pour quémander des allègements de charges sociales sur les bas salaires, l’Union des employeurs de l’économie sociale et solidaire (UDES), dans la Tribune du 5 mai, ne trouve rien de mieux que d’emboîter le pas de la politique de l’offre du Gouvernement.

Pour Alain Cordesse, président de l’UDES, « la seule voie possible pour sortir durablement de la crise » c’est « en renforçant la compétitivité des entreprises ». Et renforcer la compétitivité des entreprises, face à des entreprises de capitaux, revient forcement, pour l’UDES, à réduire le « coût du travail » !

Que l’Economie sociale et solidaire (ESS) réclame une égalité de traitement, rien de plus légitime. Mais au lieu de singer le capitalisme, elle gagnerait en crédibilité en étant plus transparente (notamment sur les conditions sociales du travail ou l’exercice de la démocratie en son sein), plus en lien avec le monde du travail et des métiers, plus solidaire avec celui des intermittents, travailleurs précaires ou des sans-emploi.

Le débat sur le niveau de cotisations et de protection sociale est un débat démocratique, citoyen – un débat de société. Les organisations de l’ESS, par leur forme même et le projet émancipateur qu’elles sont censées porter, ont beaucoup plus à y apporter qu’une simple défense de leurs intérêts particuliers. Considérer, notamment, que les cotisations sociales sont des « charges » revient à réduire le travail à l’état de marchandise et oublier que la crise n’est pas due au coût du travail mais à celui du capital – un comble pour des organisations revendiquant de nouer un « autre rapport à la lucrativité ». Réduire une organisation de l’économie sociale à une entreprise est un raccourci dangereux. Quant à la qualité d’employeur, de surcroît se réclamant de l’ESS, elle n’empêche pas de se sentir concernée par la solidarité interprofessionnelle.

Une économie sociale et solidaire qui n’est pas porteuse d’un projet d’émancipation, qui ne remet pas en question la privatisation des moyens de la production et de l’échange, qui n’est plus mue par la volonté de renforcer l’accès aux droits et la conquête de nouvelles protections sociales, participe de la régression économique et démocratique de notre pays : elle doit être combattue.

le 15 mai 2014 Minga, Coopaname

La Tribune du 5 mai 2014 – « L’économie sociale et solidaire veut aussi un allègement de charges »